Celles-ci ne garantissent ni l'authenticité, ni la proximité de l'information. Pas seulement parce qu'elles ont été subordonnées aux desseins d'un état-major restreint, homogène, centralisé. Mais aussi parce qu'elles ont servi le sensationnalisme au détriment de la réflexion. L'événement s'est substitué au fait. La logique concurrentielle a alimenté la dynamique du toujours plus : de hangars laserisés, de cormorans souillés, de cieux schrapnellisés. Etre si proche mais si lointain, le flop des mots, le toc des photos. Clauses de conscience, règles de déontologie, charte des journalistes, tout l'attirail de la corporation a volé en éclats à la chaleur des bombes « propres » . Les faits ne pouvaient que rarement être constatés, encore moins vérifiés. les commentaires étaient soumis à censure et visés comme un vulgaire « bon pour le 20 heures » par la hiérarchie militaire.
Pour l'essentiel les journalistes se sont tus. Mais pouvait-il en être autrement dès lors qu'un protocole de bonne conduite journalistique était imposé aux intervenants sur le terrain. Dans l'attente de réflexions et de propositions, il convient de saluer quelques initiatives. Un petit nombre de collectifs, regroupant quelquesprofessionnels, ont tenté, malgré l'étouffoir, de porter l'exigence de vérité et de sincérité dans le conflit du Golfe et au-delà. Le bulletin du Collectif de réflexion et d'information sur les médias et la guerre du Golfe a choisi de se situer de plain-pied dans les débats du sérail. Sa publication, l'Envers des médias (1), mène donc campagne pour « installer dans le paysage médiatique un mouvement d'action et de réflexion rassemblant journalistes et usagers... » Une sorte « d'Amnesty International de l'information... Pour remettre à l'endroit les médias, il faut d'abord en montrer l'envers », précise le collectif. La publication La guerre, l'autre information (1) se fixe comme objectif de produire concrètement... de l'information. L'accent est mis ici sur le déficit considérable d'investigation, de véracité, de tri et de hiérarchie. Le parti est pris de considérer comme recevable et nécesssaire l'information et les commentaires venus de « l'ailleurs », du nouvel ordre international : le Sud. La revue ne s'interdit pas, au contraire, d'interpeler les confrères. Ces deux revues témoignent de l'existence, certes encore marginale, d'un courant d'expression alternatif qui a parcouru les pays bélligérants. Au milieu de l'apathie générale, s'est esquissée, comme le dit l'Envers des médias : « La volonté d'un contre-pouvoir au quatrième pouvoir ».